ecrit par: Fabienne Taugwalder, sage femme suisse
Le shiatsu a beaucoup changé ma pratique de sage-femme sur plusieurs plans.
Le changement majeur est que la pratique du shiatsu a redéfini ma manière d’être en contact par le toucher ou peut être qu’il a centré ma manière d’être en relation autour du toucher. J’ai réellement trouvé (retrouvé ?) la puissance du lien qui se crée par ce biais. Notamment en salle d’accouchement où il faut parfois très rapidement créer ce contact parce que bébé est pressé, mais aussi en post-partum.
Le stage de shiatsu pour les sages-femmes de Suzanne Yates m’a permis d’acquérir en 6 jours une bonne connaissance des mécanismes de base de l’équilibrage global de l’énergie par le shiatsu. J’ai pu directement intégrer cette technique à ma pratique.
Le toucher par le biais du shiatsu permet une connexion rapide et profonde avec la parturiente. Quasi instantanément la femme peut se relâcher et aller dans le sens du processus. Mes relations avec les patientes en sont sorties enrichies.
Plus précisément, l’efficacité de certains points est étonnante. Dans mon expérience VB 34 a eu des répercussions quasi miraculeuses sur certaines situations avec des dystocies du col dans le démarrage ou en cours de travail. Dans plusieurs situations, l’effet du traitement était observable au niveau du CTG, que ce soit au niveau des mouvement fœtaux ou de la régularisation des contractions, par exemple.
La possibilité de transmettre la localisation des points et la technique du toucher au partenaire de naissance au cours d’une séance de préparation à la naissance est aussi très précieuse. Selon le retour des couples, la femme s’est sentie soutenue et le partenaire de naissance s’est senti pleinement participant.
J’ai eu de très bons résultats également en post-partum dans des situations où les femmes se sentaient déconnectées de leur corps suite à une cicatrice de césarienne ou une lésion du périnée.
En général, j’ai pu observer que la pratique du shiatsu était également favorable à mon propre niveau de fatigue et qu’une « bulle » de quiétude peut se créer au sein de l’agitation parfois inévitable en milieu hospitalier.
Je vais donner un exemple plus étoffé de cette dernière expérience :
comme je pratique en milieu hospitalier je propose le shiatsu à des personnes qui ne sont pas primairement dans une demande de prise en charge corporelle. Au début du traitement, nous parlons souvent beaucoup parce que c’est parfois mal aisé pour certaines patientes de juste être en relation par le toucher dans le silence. Mais rapidement les mots s’espacent avec la détente qui avance et dans ces moments j’expérimente concrètement le changement qui se fait dans le niveau de relation qui s’approfondit et s’intensifie. Souvent les femmes reportent une grande détente et sérénité à la suite de ces traitements et mes collègues mentionnent la perception d’une ambiance de calme et de bien-être qui se dégage dans la chambre lors de notre pratique.
Je pense que le lien généré par la pratique du shiatsu permet un centrage autour de l’essentiel et permet aussi à la patiente de créer (recréer ?) des liens. Lien avec l’enfant à venir ou lien à elle-même. A ce sujet le fait de montrer des points ou des « holding » au compagnon permet aussi de créer cette mise en relation dans le couple et souvent en salle d’accouchement, j’ai remarqué que cette pratique aide le futur père à trouver sa place.
Je pense que la maternité est une période de la vie des femmes où les liens entre le corps et le psychisme sont particulièrement intriqués et je me demande si la force du lien créé par le shiatsu n’est pas due à cette possibilité de prendre en charge la patiente dans cette globalité, avec cette « matérialité » des émotions.
Un autre aspect du changement se situe au niveau de mon identité professionnelle. Cette pratique par le toucher m’a permis de développer une aisance et une assise dans ma pratique en amenant une couleur YIN dans un milieu hospitalier plutôt YANG. Elle m’aide à rester centrée dans des moments de stress et de ne pas perdre la connexion avec la femme et l’enfant malgré le fait de devoir agir dans l’urgence. Un exemple pourrait être que je propose à la patiente (ou/et au compagnon) de poser leurs mains sur l’abdomen gravide et de se mettre en lien avec leur enfant pour lui expliquer ce qui se passe quand je fais les préparatifs pour une césarienne.
Concrètement ce que j’utilise le plus est le « holding » de l’axe Cœur-utérus-Rein et du DAI MO dans l’absolu. Pour les menaces d’accouchement prématuré, le travail sur les méridiens du R et de la Rt, En salle d’accouchement les points antalgiques du sacrum et de GI4, VB34 pour le col, V60 et VB21 pour la descente du bébé et le travail sur le méridien de V dans sa globalité. En post-partum souvent pour les fortes montées de lait ou les engorgements, le travail sur l’épaule.
Un autre grand domaine d’intervention pour la pratique hospitalière est le fait que le shiatsu permette de contrecarrer certains effets secondaires d’interventions obstétricales, par exemple la péridurale. Malgré le fait que nous ayons un système de péridurale qui permet la mobilité de la patiente, souvent le fait de travailler les méridiens (V/VB) des jambes redonne une meilleure perception de la globalité du corps et le fait de travailler les points d’induction et le DAI MO permet de retarder l’introduction d’ocytocine de synthèse (quasi systématique vu que souvent la pose de la péridurale ralentit les contractions). Le shiatsu permet d’entretenir la dynamique et la physiologie du travail.
La limitation de l’usage est surtout liée à un facteur temps quand je n’ai pas l’exclusivité d’une personne dans ma prise en charge, mais le fait de montrer des points au compagnon perme de dépasser cette limite. Notamment dans les situations où il y a une provocation médicamenteuse, je montre les points d’induction si le couple est intéressé. L’autre limitation sont les situations d’urgence, par exemple lors d’une délivrance qui ne se fait pas, j’ai des actes obstétricaux à accomplir … je ne peux pas tenir VB21 en même temps.
Voilà en gros quelques éléments merci, pour la transmission de cet art du toucher que tu m’as faite et pour tout ton travail autour de la maternité
Fabienne Taugwalder, je viens de découvrir ton écrit en tant que sage-femme.
Étant moi-même sage-femme hospitalière (française) et en formation de shiatsu dans une école, j’ai aimé lire tes ressentis, ta façon d’être, ton approche vis-à-vis des couples et du shiatsu au sein du monde hospitalier plutôt Yang.
Je pense que le shiatsu est véritablement une belle aide à proposer.
Merci pour tes précisions en fonction des moments de la grossesse, du travail de l’accouchement et du post-partum.
Je n’ai pas encore fait de stage avec Suzanne Yates. Peut-être par la suite…
Karen